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Une rencontre avec la Convention Citoyenne pour le Climat

Le Président de la République a lancé à en avril 2019 une initiative très intéressante avec le projet d’une Convention Citoyenne pour le Climat. Le projet a été concrètement lancé en juillet 2019.

L’idée était de tirer au sort 150 citoyens représentatifs de la population française et de les faire plancher pendant 4 mois sur les sujets clefs impactant le climat dans notre société. Après avoir écouté de nombreux experts et lu de nombreux rapports d’expertise, cette assemblée doit alors proposer des mesures qui permettront de réduire les émissions de CO2 dans un esprit de justice sociale. Le Président de la République s’est alors engagé à ce que les mesures proposées par cette Convention ne soient aucunement filtrées et présentées directement soit au vote via un référendum, ou à l’Assemblée Nationale soit par la voie réglementaire directe. Vous pouvez retrouver toutes les informations sur le site de la Convention Citoyenne pour le Climat.

Leur travail a débuté fin octobre, et on voit rapidement avec les vidéos disponibles sur le site, que les experts invités sont de très bons niveaux et n’hésitent pas à présenter la situation comme elle est, c’est-à-dire pas simple et pas très réjouissante. Cette initiative me semble louable sur le principe pour deux raisons : la lutte contre le réchauffement climatique et la démocratie.

Permettre à des citoyens de construire les lois qui impacteront leur quotidien est un exercice de démocratie directe qui manque cruellement dans notre pays. Le référendum d’initiative partagé est ce qui s’en approche le plus aujourd’hui mais nécessite d’obtenir 4,7 millions de signatures de soutien de la population et 20% des parlementaires avant que la loi ne soit présentée à l’Assemblée. Suite aux mouvements des gilets jaunes, le Président de la République avait annoncé vouloir assouplir les conditions du RIP mais rien n’a avancé.

Etant donné la réaction sociale à l’augmentation du prix de l’essence, commencée il y a un an et qui dure encore, il était urgent pour le monde politique national de réapprendre à écouter la population.

Donner le pouvoir à des citoyens de construire des mesures pertinentes vis-à-vis du réchauffement climatique permettra potentiellement une meilleure adhésion future de la population aux décisions. Je dis bien potentiellement parce que les premières idées qui ressortent de la Convention seront surement beaucoup moins populaires qu’ils ne le pensent. Je les regarde plus en détail dans cet autre article.

On peut aussi s’arrêter sur le fait que ces citoyens produisent en final un travail dont les députés ou le gouvernement ont la charge. Cyril Dion, une des personnes choisies comme garant du bon fonctionnement de la Convention, explique clairement que le gouvernement ne peut pas proposer les réformes nécessaires pour drastiquement réduire les émissions de gaz à effet de serre parce qu’il a trop de pression électorale (voir l’interview sur France Inter d’août 2019). Il faut que ce genre de décisions vienne de la population pour qu’elles soient acceptables. C’est un aveu d’échec triste sur le courage politique devenu une denrée rare. Le gouvernement a plein d’idées pour réduire les dépenses publiques dans une stratégie capitaliste de la vieille école qui satisfait son électorat, mais prendre des décisions audacieuses pour changer réellement notre société lui est impossible.

Cette introduction longue mais indispensable pour planter le décor m’amène à vous raconter l’évènement semi-informel, auquel j’ai assisté le 28 novembre 2019 à la Recyclerie à Paris, organisé à l’initiative de plusieurs citoyens participant à la Convention. Ils souhaitaient rencontrer des personnes extérieures à la Convention pour leur parler du processus en cours, répondre à leurs questions, et recueillir leurs idées. Après les avoir écoutées pendant plus d’une heure, je n’ai pas été surpris de cette demande de leur part. Il ressort de leurs témoignages une très grande motivation, une réelle envie de bien faire, une ouverture d’esprit, et surtout un énorme sentiment de responsabilité.

Plusieurs d’entre eux ont parlé d’‘une vraie aventure humaine’ en partageant leur expérience avec nous. La rencontre de personnes de milieux très différents leur a ouvert des perspectives humaines et intellectuelles bien au-delà de leurs attentes. La relation sociale pour construire le bien commun : l’essence même de la démocratie. Une vraie bouffée d’air frais.

Ces personnes ont également témoigné à plusieurs reprises de l’appréciation qu’ils ont pour chaque message de soutien reçu de ‘l’extérieur’. Ils ont conscience de la responsabilité énorme qui leur incombent et qui est parfois lourde à porter. Le soutien d’autres citoyens leur permet de construire un sentiment de légitimité absolument nécessaire pour qu’ils n’aient pas d’hésitations dans leur démarche. Un membre de la Convention a avoué avoir eu l’impression de reprendre ses études devant la masse de documents à lire. C’est un deuxième boulot qu’ils prennent pendant 4 mois puisqu’ils ne se réunissent que sur 6 sessions de 2-3 jours, avec un travail conséquent entre chaque session.

L’auditoire était captivé. Chaque question posée sans exception débutait par une marque de respect et d’admiration pour la mission qu’ils ont endossée. A de nombreuses reprises, les questions étaient précédées par une confirmation de leur légitimité. On sentait comme une envie de chaque personne du public de transmettre sa force et son courage à ces citoyens qui nous représentent.

Les questions posées sur la manière de procéder et sur les sujets traités montraient une réelle connaissance des enjeux. J’étais même agréablement surpris de ne pas entendre de remise en cause du principe même de la Convention, qui aurait pu être considéré comme un ‘machin’ lancé par le Président pour que les écolos aient un os à ronger. Les seules questions montrant une certaine défiance étaient liées aux engagements du Président sur l’application des mesures proposées. Cyril Dion, présent avec les membres de la Convention à cet évènement, ne pouvait que répéter la parole donné du Président.

De mon point de vue, l’aboutissement du travail de cette Convention, sera un test plus fort que des élections pour la crédibilité du Président sur les sujets écologiques. Mais pour que ce le soit réellement, il faut que l’existence et le travail de cette Convention soient beaucoup plus largement diffusés. Malheureusement, peu de médias relaient leurs activités. Il faut donc que nous en parlions tous autour de nous. C’est aussi important que la réforme des retraites. C’est de l’avenir de notre société dans les 10 prochaines années dont il est question avec cette Convention. Notre société doit basculer sur un autre modèle de fonctionnement économique et sociale, et le travail de ces citoyens peut en être le déclencheur.

Cette initiative de la part de  membres de la Convention, souhaitant rencontrer des citoyens non participants, était une première sur Paris mais espérons qu’elle va se reproduire rapidement dans d’autres villes de France dans les 2 mois d’activité restant pour la Convention.

Les attentes des citoyens participant à la Convention et de tous les citoyens qui suivent leur travail sont énormes. Espérons que le Président de la République tiendra sa parole et que cet exercice démocratique encore plus direct que le Grand Débat National se concrétisera avec des mesures à la hauteur des enjeux. Je veux rester optimiste.

Je vous propose de vous présenter les premières pistes de réflexion présentées par la Convention Citoyenne pour le Climat dans un autre article que vous trouverez ici.

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