Quel avenir pour les entreprises dans un contexte de redirection écologique ? Partie 2: l’industrie pétrolière

Cet article a été écrit dans le cadre du groupe de réflexion Les Utopistes Réalistes que j’ai fondé en 2020.

Le collectif “Les Utopistes Réalistes” porte sa réflexion autour du concept de redirection écologique. Nous proposons une série de 3 articles qui questionnent ce que pourrait être l’avenir des entreprises face aux défis écologiques. Cette introduction se fonde sur la réalité du contexte technique et économique de deux secteurs fortement exposés aux risques associés aux limites planétaires. Le premier article se penche sur le secteur automobile, le deuxième sur le secteur pétrolier, et le troisième présente un approfondissement du concept de redirection écologique au regard des analyses de ces deux secteurs.

Le 2eme article sur le secteur pétrolier est maintenant disponible.

Bonne lecture !

Les nouvelles stratégies du secteur des hydrocarbures : un premier signe de redirection écologique ?

Résumé

Le secteur de la production d’hydrocarbures est réputé particulièrement agile, dans un contexte de fluctuation croissante des prix de marché des ressources fossiles et du nouveau contexte énergétique. Dans un premier mouvement de diversification opéré il y a plus de deux décennies, certains grands donneurs d’ordre – ou majors – ont proposé de nouvelles offres dans la production d’énergies d’origine solaire, avec comme principal levier la valorisation de savoir-faire d’ordre commercial et financier. D’autres investissements ont été déclenchés depuis par des acteurs de référence sur d’autres filières alternatives contribuant à diminuer l’intensité carbone de leur activité. Plus récemment, parmi les leviers de diversification explorés par les acteurs clés de la filière, un mouvement sérieux vers le secteur de l’éolien de mer s’est mis en place, et celui-ci concerne des compétences plus techniques et distinctives, comme les capacités d’ingénierie et d’opérations en milieu marin, particulièrement complexes, ou encore la gestion de projets fortement capitalistiques et à cycle long. Cette translation du secteur de l’offshore pétrolier vers l’éolien marin nous semble concilier une voie vertueuse pour les emplois, avec des enjeux qui restent toutefois à mieux caractériser autour de l’équation économique des majors sur ces nouveaux marchés. Pour représenter un véritable virage stratégique ou redirection écologique, ces nouveaux investissements devront selon nous s’accompagner d’une véritable prise de conscience des dirigeants du secteur de l’enjeu systémique du dérèglement climatique, permettant ainsi le déclenchement d’autres leviers complémentaires à mettre en oeuvre aussi rapidement que possible face à l’urgence de décarbonation de l’économie mondiale.

La redirection écologique : entre contrainte et opportunité pour un secteur industriel au cœur de l’emballement climatique et doté d’une majorité d’emplois hautement qualifiés

Les projets stratégiques en cours de déploiement au sein des grands opérateurs pétroliers visent tous à défragiliser leurs activités vis-à-vis de leur dépendance au carbone. Est-ce suffisant pour amorcer la baisse en valeur absolue des consommations mondiales d’énergies fossiles, qui représentent près de 75% de nos émissions de gaz à effet de serre ? Plus généralement, comment l’industrie pétrolière et gazière peut-elle répondre de façon socialement responsable au défi de la transition énergétique ? Dans quels domaines les emplois de cette filière à fort contenu technologique pourraient être valorisés pour contribuer à résoudre l’équation écologique ?

C’est autour de ces questions clés relatives au futur du secteur pétrolier et gazier que nous proposons d’explorer, sous le prisme de la redirection écologique, les stratégies des acteurs évoluant dans cette filière critique de l’économie mondiale.

D’abord, relevons que les leviers de réponse identifiés par les grands opérateurs sont nombreux, et n’impliquent pas tous une baisse des consommations d’énergies fossiles, mais plus généralement une baisse de leur intensité carbone[1]. Certains investissements, comme ceux dans la capture et séquestration du CO2, n’impliquent pas de changement majeur dans leur chaîne de valeur, et se résument à l’ajout d’une nouvelle brique technologique dans un processus industriel existant ; ces développements, qui visent à préserver à terme la consommation des énergies fossiles en décarbonant leur production en amont, en sont encore à leur balbutiement, et ne peuvent répondre seuls et de façon crédible à l’urgence climatique. De même, l’hydrogène sous-tend une valorisation directe des savoir-faire du secteur des hydrocarbures dans les métiers du gaz, et ce nouveau vecteur[2] énergétique, bien qu’il fasse état d’une accélération certaine des investissements, devra d’abord qualifier les volumes de ses nombreux marchés d’application (aciérie, raffinerie, transports…) avant de prétendre à occuper un rôle majeur dans la décarbonation des usages énergétiques.

Les filières renouvelables : une priorité stratégique qui s’affirme pour de plus en plus d’acteurs clés de la filière des hydrocarbures

Nonobstant leurs portefeuille de R&D, c’est davantage l’électrification du mix énergétique[3] qui justifie depuis plus d’une décennie la majorité des choix d’investissement hors du cœur de métiers des acteurs du domaine des hydrocarbures, et ceci dans le but de diminuer leur intensité carbone le plus rapidement possible. Pour passer de la vente d’huiles ou de gaz à des électrons faiblement carbonés, certains parlent de diversification, d’autres de transformations radicales. Tous constatent ces dernières années une montée en puissance des acteurs de la filière dans la production d’électricité d’origine renouvelable. Certains fondamentaux reviennent de façon récurrente, avec entre autres la recherche de valorisation de savoir-faire existants, en particulier ceux de nature à créer des avantages compétitifs sur ces nouveaux marchés cibles, où les acteurs du secteur pétrolier représentent de nouveaux entrants.

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Critères clés d’arbitrage des majors pétrolières pour orienter leurs investissements dans les énergies bas carbone – Source : GECKOSPHERE®

Ce tableau de synthèse laisse entrevoir les principales raisons qui ont justifié les orientations stratégiques des acteurs du secteur pétrolier et gazier prises ces dernières années et à l’avenir sur les filières bas-carbones. Quelles sont celles qui sont susceptibles de prendre une place importante voire prépondérante au sein de ce secteur particulièrement exposé aux enjeux climatiques ?

Le solaire a été rapidement qualifié d’attractif par les majors internationales. Dès l’entrée dans le XXIème siècle, elles ont anticipé le potentiel de marché important de ces technologies, qui représente sans doute l’un des critères les plus dimensionnants pour les grands majors. Ces dernières ont aussi cherché à valoriser sur ce marché diffus leur empreinte géographique, particulièrement large, avec une connaissance fine des circuits d’influence locaux via les équipes présentes dans un grand nombre de pays du monde. Finalement, dans le cas du photovoltaïque, il n’y a pas eu de transfert de compétences technologiques, mais davantage une recherche de synergies d’ordre commercial, stratégique et financier, combinées à une présence géographique étendue.

L’éolien et le nucléaire ont eux aussi été regardés de près par tous les acteurs de la filière, mais n’ont jamais été qualifiés jusqu’alors de priorités stratégiques, et ceci pour des raisons bien différentes.

Pour l’éolien terrestre, la taille limitée des projets, dont l’investissement tourne autour de 15 à 100 millions d’euros, soit un à deux zéro de moins que pour un projet pétrolier ou gazier, ne valorise pas suffisamment les savoir-faire distinctifs des leaders du secteur pétrolier, notamment autour de la gestion des risques de projets complexes et capitalistiques. Le plus souvent, leur activité dans ce domaine reste concentrée autour de grands pays comme les USA, qui développent, à l’inverse des pays européens, de grands parcs terrestres depuis plus de 30 ans, se rapprochant ainsi des niveaux d’investissement standards de la filière.

Quant au nucléaire, les dilemmes sur une diversification ou non ont globalement persisté jusqu’à l’accident de Fukushima, il y a environ 10 ans. Le secteur cochait en effet la plupart des cases pour retenir l’intérêt des pétroliers, d’autant que certains de leurs grands clients évoluent au sein des rares pays au monde – ils sont aujourd’hui une petite trentaine – à pouvoir prétendre accueillir des projets d’implantation de centrales nucléaires dans les 10 à 20 prochaines années. Au-delà de l’apprentissage de savoir-faire nouveaux et complexes, c’est davantage le caractère de “niche” de ce marché qui a incité les opérateurs à refermer l’option de l’électronucléaire[4].

L’éolien en mer : véritable game changer de la transition énergétique … et de la diversification des pétroliers offshore ?

Aujourd’hui, si les énergies renouvelables représentent sans nuance l’un des axes stratégiques majeurs du secteur des hydrocarbures, c’est aussi parce que les arbitrages et convictions d’hier sur la filière éolienne ont été sérieusement réévalués avec le développement de l’éolien en mer, qui fait l’objet depuis 5 à 10 ans d’une attention grandissante de la part des grandes majors, et plus généralement de toute la filière de l’offshore pétrolier : des ingénieristes aux installateurs et exploitants en mer, en passant par les équipementiers.

En veille active depuis près de 20 ans, les opérateurs pétroliers accélèrent aujourd’hui leurs investissements sur ce marché présenté en 2019 par l’Agence internationale de l’Énergie (AIE) comme l’un des piliers de la transition énergétique. Après s’être limité aux eaux européennes pendant 25 ans, le marché s’internationalise dans tous les océans du monde ou quasi, et observe une phase de croissance soutenue au sein de grands pays consommateurs d’électricité. C’est devant ces perspectives de développement particulièrement favorables que l’éolien en mer est aujourd’hui considéré comme une priorité stratégique par l’industrie des hydrocarbures. Leur intérêt ne se limite toutefois pas à ce critère majeur : cette filière de production d’électricité renouvelable[5] en devenir représente aussi pour les industriels des énergies fossiles offshore :

●      Dans une vision sous contrainte : un axe solide pour répondre tôt ou tard, selon la dynamique de décarbonation de l’économie mondiale des trentes prochaines années, à un effondrement de leur coeur d’activités[6], impliquant une véritable casse sociale si l’anticipation reste insuffisante.

●      Dans une vision plus optimiste : un choix stratégique majeur pour rehausser à court terme les objectifs d’atténuation de la filière et viser une trajectoire compatible avec le principe de neutralité carbone à horizon 2050 – ou tout du moins y contribuant de façon sensible.

Au final, les leviers qu’ont actionnés les principaux acteurs du secteur pour entrer avec vigueur sur ce nouveau marché à fort potentiel font appel à une grande variété de métiers déjà présents au sein de la filière : ingénierie complexe, gestion des opérations en mer, notamment sous-marines, financement de projets capitalistiques, maîtrise des coûts de projets à cycle long, intégration des métiers amont et aval jusqu’aux clients finaux… Cette liste, non exhaustive, représente un nombre d’emplois et de savoir-faire importants directement valorisables sur les projets de développement, d’installation et d’exploitation de fermes éoliennes offshore.

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Crédit photo Muehlhan AG

 Le virage des pétroliers vers l’éolien en mer : une décision actée mais des incertitudes encore persistantes sur le succès de ces nouveaux entrants

Toutefois, la valorisation de savoir-faire ne suffit pas à résoudre certaines difficultés auxquelles les pétroliers vont devoir faire face, notamment autour de la pression concurrentielle qui s’est considérablement renforcée ces dernières années dans les eaux européennes. Les énergéticiens pionniers déploient en effet des stratégies commerciales pour le moins agressives afin de contrer l’arrivée de nouveaux entrants particulièrement menaçants tels que les opérateurs pétroliers. Par exemple, EDF Renouvelable, déjà lauréat de la moitié des capacités attribuées en France depuis 2011, a remporté le dernier appel d’offre national[7face à de nombreux pétroliers qui visaient une entrée dans le pays qui bénéficie du deuxième gisement de vent européen. Plus généralement, une guerre des prix a fait chuter les coûts de l’électricité en mer, compliquant la tâche des acteurs des énergies fossiles, habitués à des niveaux de rentabilité plus en phase avec les risques techniques et financiers que génèrent les projets maritimes complexes.

Considérant leur expertise du milieu marin et les perspectives du marché, gageons que davantage d’opérateurs offshore prennent rapidement des positions clés dans de nombreux pays initiant ou consolidant leurs investissements dans l’éolien en mer, à l’image d’Equinor (ex-Statoil) ou d’Ørsted (ex-DONG). Ce dernier, leader du marché, symbolise en changeant son nom la transformation des acteurs de l’offshore pétrolier vers les nouveaux métiers de la production d’énergies renouvelables en mer : DONG était l’acronyme de Danish Oil & Natural Gas, et Ørsted est le nom du chimiste danois qui est à l’origine de la découverte de l’interaction entre électricité et magnétisme.

A noter que les grands donneurs d’ordre du secteur pétrolier ne sont pas les seuls à investir le marché stratégique de l’éolien en mer : les industriels spécialisés et fournisseurs de rang 1 tels que Saipem, Technip-FMC, Subsea 7 ou encore SBM Offshore, ont initié ou renforcé ces dernières années leurs investissements dans la fabrication de sous-systèmes (fondations, flotteurs), ou encore dans des capacités d’intervention en mer (navires complexes, robotique sous-marine..). Ces derniers cherchent en particulier à valoriser leur savoir-faire dans l’éolien offshore flottant, un marché stratégique aujourd’hui au stade d’industrialisation et qui fait sans doute référence au potentiel de marché le plus important à terme, toutes filières énergétiques confondues.

Cette diversification de tout un secteur vers ces nouveaux marchés s’inscrit finalement dans une recherche de transfert direct et pérenne de compétences maîtrisées et distinctives. Mais ces nouveaux entrants doivent aussi acquérir des métiers spécifiques aux marchés des énergies renouvelables, et leur succès n’est pas complètement acquis. Ces derniers vont devoir gérer à la fois le métier d’opérateur-producteur d’hydrocarbures et celui d’énergéticien-électricien. Un des dilemmes pour les décideurs va donc porter sur l’évolution du poids relatif entre les activités historiques du secteur et ces nouveaux relais de croissance, qui font état de fondamentaux de marché bien différents. Les risques de dispersion sont réels et l’enjeu d’acquisition de nouvelles compétences et de leur intégration dans les modèles existants seront des facteurs clés pour assurer cette transformation.

Considérant ces enjeux, si le secteur poursuit voire accélère sa transformation engagée dans les énergies renouvelables, l’emploi futur des pétroliers offshore restera en mer, où de nombreux métiers et savoir-faire présents au sein des acteurs de la filière des hydrocarbures pourront s’exprimer sur le marché stratégique de l’éolien en mer.

Il n’en reste pas moins que la nouvelle donne climatique implique une réponse systémique, avec non seulement pour les entreprises une traduction rapide de l’enjeu d’atténuation par la baisse de leur intensité carbone, mais aussi par une déclinaison crédible des enjeux de sobriété énergétique, qui implique une baisse des consommations mondiales en valeur absolue. A l’heure actuelle, ces enjeux, complexes, restent peu ou pas pris en compte par les stratèges de ces entreprises.

Conclusion

Si on veut voir le verre à moitié plein : la redirection écologique des acteurs de la filière des hydrocarbures a démarré, avec en particulier des investissements massifs dans la filière de l’éolien offshore. Si on souhaite le voir à moitié vide, les choix stratégiques en cours restent circonscrits à une mue écologique d’ordre technologique et non systémique – autrement dit à une transition énergétique telle qu’elle est engagée depuis deux décennies déjà.

Indépendamment de ces deux points de vue contrastés, notons que la filière valorise pleinement les savoir-faire en place, et ils sont nombreux. Considérant l’inertie du système énergétique et les cycles d’investissement particulièrement longs dans ce secteur (ils sont supérieurs à au moins 20 ans), nous restons interrogatifs et vigilants sur l’ampleur et la rapidité des stratégies d’atténuation mises en œuvre par le secteur des hydrocarbures, notamment sur les volets relatifs à la sobriété énergétique, qui représente l’une des clés de la redirection écologique, et qui reste sous-estimée au profit d’une poussée des investissements vers une réponse strictement technologique.

Dans quelle mesure une transformation profonde et plus cohérente, en phase avec l’enjeu de neutralité carbone mondiale, s’opérera au sein du secteur des énergies fossiles ? Quel poids les énergies renouvelables auront-elles dans leur portefeuille d’activités en 2050 ? Et pour combien d’emplois “sauvés” ? La destruction créatrice chère à Schumpeter aura-t-elle lieu sur ce secteur critique de nos économies ? La contrainte réglementaire couplée au soutien politique[8], indispensables, se structurent mais ne suffiront pas. De même, la responsabilité des clients, souvent opposée à celle des entreprises, ne peut non plus engager à elle seule une réponse des industriels à la hauteur de l’urgence climatique. De même pour d’autres parties prenantes comme les associations ou même les investisseurs : l’actualité récente autour du procès gagné par des organisations environnementales aux Pays-Bas contre Shell, ou le succès d’un fond activiste à s’installer au conseil de surveillance d’ExxonMobil, en sont des premières illustrations concrètes : elles ont certes le mérite de contribuer à des évolutions structurelles du secteur, mais ne suffisent pas à déclencher rapidement un changement de stratégies majeur auprès des entreprises concernées.

Au final, nous pensons que la prise de conscience des dirigeants de la hauteur de marche à franchir représente un premier jalon essentiel : celui d’une volonté assumée d’orienter de façon prioritaire la redirection écologique de leur entreprise. Cette transformation devra être systémique, en incluant la dynamique d’évolution rapide des technologies et surtout de nouveaux modèles économiques décorrélés du seul objectif de croissance du chiffre d’affaires. Le plus tôt sera le mieux ; en effet, comme le rappelle souvent Valérie Masson-Delmotte[9], “chaque année compte, et chaque dixième de degré compte”.

Les Utopistes Réalistes

Le collectif “Les Utopistes Réalistes” est un groupe de réflexion indépendant uni par un même sentiment d’urgence face à la transformation nécessaire de notre société dans le cadre des limites planétaires. Créé au début de la crise sanitaire au printemps 2020, le groupe est constitué de professionnels d’horizons divers qui combinent leurs expertises pour proposer des approches hétérodoxes afin d’accompagner la redirection écologique de notre société.

Références

[1] L’intensité en carbone est le rapport des émissions de gaz à effet de serre à la production de l’entreprise.

[2] On appelle vecteur une forme d’énergie capable d’être aisément transportée et distribuée. On emploie ce terme notamment pour l’électricité, les combustibles gazeux et la chaleur distribués via des réseaux.

[3] La part de l’électricité dans la consommation mondiale d’énergie ne fait qu’augmenter depuis sa généralisation dans les pays développés. Cette part de l’électricité était de moins de 3% en 1940, et a augmenté fortement depuis avec l’augmentation de différents types d’usages, pour atteindre environ 20% du mix énergétique en 2020. En termes de perspectives, ce taux pourrait franchir, selon de nombreux travaux prospectifs de référence visant la neutralité carbone mondiale dans la seconde moitié du XXI siècle, le seuil symbolique des 50% à horizon 2050. En effet, l’électricité se révèle l’un des vecteurs clés, sinon le plus pertinent, capable de décarboner quasiment tous les secteurs énergétiques.

[4] Ces deux dernières années, selon l’AIE, plus de 75% des 400 à 450 milliards d’euros investis tous les ans dans les filières électriques ont concerné les filières renouvelables. 20% environ ont été consacrés à des centrales thermiques fossiles de type gaz et charbon, et 5% environ pour le nucléaire, qui pèse moins de 10% du mix électrique mondial. Considérant notamment les améliorations majeures réalisées ces 10 dernières années dans la production d’électricité renouvelable, les perspectives à 20 ans du marché mondial de l’électronucléaire n’atteignent pas des niveaux comparables, et sont dorénavant jugées bien moins attractives par ces potentiels nouveaux entrants.

[5] Les parcs éoliens en mer actuels renvoient à une capacité de production de l’ordre de 500 MW par projet. Les éoliennes les plus récentes, de l’ordre de 12 à 15 MW (à comparer à 2-3 MW pour les éoliennes terrestres) accompagnent l’arrivée de projets dont l’investissement se compte en plusieurs milliards d’euros pour des capacités électriques installées de plusieurs GW, correspondant aux niveaux de production des installations conventionnelles telles que les centrales thermiques ou électronucléaires.

[6] L’offshore est plus coûteux que la production d’hydrocarbures à terre, et les enjeux de transition climatique portent davantage sur la diminution de la demande en pétrole que celle de l’offre – tous les leaders du secteur ont exprimé ces tendances ces dernières années, notamment le CEO de BP (qu’on peut appelé ici Beyong Petroleum plutôt que British Petroleum) dans une intervention remarquée en septembre 2020, où les projections du Groupe dans un monde post carbone laisse présager une division par 4 de la demande pétrolière d’ici à 2050 (!).

[7] Ce projet d’une capacité de 600 MW qui seront installés au large de Dunkerque a été attribué au prix d’achat de 45€/MWh (hors raccordement). Un prix trois fois plus bas que ceux des premiers appels d’offres nationaux attribués en 2011 et 2012.

[8] Pour un avis sur le soutien politique français dans les énergies de la mer lors du dernier exercice de Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) : https://www.usinenouvelle.com/article/tribune-a-quand-une-veritable-programmation-pluriannuelle-de-l-energie-et-de-son-industrie.N779089

[9] Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue, est directrice de recherche au CEA et coprésidente du groupe de travail 1 du GIEC, le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat.

Source image du bandeau: Photo by Dean Brierley on Unsplash

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